Entretien avec le Dr Sylvie Delivet, endocrinologueà Paris.

Savoir Maigrir : Quel est le rôle deshormones thyroïdiennes dans l’organisme ?
Dr Sylvie Delivet : Les hormones thyroïdiennes règlent le métabolisme énergétique de toutes les cellules de l’organisme. Un surplus ou un déficit d’hormones touchera tous les organes. Dans l’hyperthyroïdie, il y a un amaigrissement. Tout se passe comme si la " vitesse de fonctionnement " des cellules était accélérée. Les femmes (ce sont essentiellement elles qui sont touchées), ont un appétit qui est augmenté mais perdent du poids, car elles n’arrivent jamais à compenser ces dépenses énergétiques qui sont extrêmement importantes. L’amaigrissement n’est pas isolé. Il s’associe toujours à d’autres pathologies qui touchent les autres organes, en particulier une tachycardie, avec des impressions de palpitations.
Il y a une prédominance féminine dans toutes les pathologies thyroïdiennes, sans que l’on en connaisse la raison. Devant une prise de poids, le diagnostique de pathologie thyroïdienne est plus rare. La prise de poidssurvient lorsque les hormones thyroïdiennes sont très basses. De plus, cette prise de poids sera très différente selon les femmes. Il y a des femmes jeunes, qui sont en hypothyroïdie et qui auront tout de même gardé un poids stable. On ne sait pas très bien pourquoi certaines femmes plus que d’autres vont prendre du poids. Cette pathologie n’est pas un mécanisme fréquent deprise de poids. Actuellement, le diagnostique d’hypothyroïdie est fait très précocement, avant que les manifestations cliniques ne s’installent. Par contre, la grande fréquence des problèmes thyroïdiens chez la femme fait qu’un diagnostique de pathologie thyroïdienne peut être posé au détour d’une consultation dont le motif initial est une prise de poids. Le problème thyroïdien peut ne pas expliquer la prise de poids, et le traitement ne leur permettra pas de maigrir. Il faut bien dissocier les choses.
 
S.M. : Donc, une femme qui aura pris du poids suite à une hypothyroïdie ne le perdra pas même en rétablissant l’apport hormonal qu’il lui manquait ?
Dr S. D. : Si, un régime pourra parfaitement les faire maigrir, surtout si elles sont sous traitement hormonal. Chez les gens qui ont des difficultés à perdre du poids, il y a souvent d’autres facteurs qui entrent en jeu. Par contre, chez quelques femmes ayant une hypothyroïdie très avancée, le rétablissement d’un taux d’hormones normal va effectivement leur permettre de perdre quelques kilos plus facilement. Mais une alimentation contrôlée et de l’exercice physique restent les deux facteurs essentiels pour arriver au résultat souhaité. La thyroïde ne peut pas être la cause de tous les problèmes, car une fois que les kilos sont là, si l’alimentation est débridée et qu’on ne sort pas de son fauteuil, la perte de poids ne se fera pas.

S.M. : Les troubles thyroïdiens se soignent-ils facilement ?
Dr S. D. : Oui. L’hypothyroïdie se soigne facilement. L’hyperthyroïdie est de traitement plus délicat. Tout dépend de la cause, qu’il faudra rechercher, car il y en a plusieurs. Puis il faudra mettre en place un traitement adapté. Ce sera souvent un traitement long, dans les cas les plus fréquents. Ces femmes vont passer d’une hyperthyroïdie avec un appétit augmenté et un amaigrissement évident à une normalisation de leurs hormones. Leur appétit restera par contre toujours important, à cause de l’habitude prise de manger de grosses quantités même si désormais elles ont moins faim. Il arrive qu’une fois le traitement hormonal mis en place et leur métabolisme normalisé, elles se mettent à prendre un peu de poids si elles ne diminuent pas en conséquence le volume de leurs repas. Les cancers de la thyroïde se dépistent bien, et surtout se soignent bien. Les formes majoritaires sont des formes tout à fait accessibles aux soins. Enfin, il faut dire aussi que les femmes déclarent souvent des problèmes thyroïdiens après un accouchement. On met généralement sur le compte de l’arrivée du bébé les problèmes d’humeur et surtout de fatigue. Hors, il arrive qu’une hypo-thyroïdie se déclare après une grossesse, et passe souvent inaperçue. Faire des analyses et la traiter permettrait de soulager les maux de ces jeunes mamans.