Au moindre kilo en trop, il arrive parfois que vous remettiez en cause votre propre pilule. Pourtant, celle-ci ne fait pas en elle-même prendre du poids. Explications avec la collaboration du Docteur Martin Winckler, médecin généraliste et auteur de « Choisir sa contraception » (Editions Fleurus), et du Docteur Christian Jamin, gynécologue.
Toute contraception orale exige une consultation avec son gynécologue ou son médecin traitant pour une prescription ou un suivi. Elle repose sur la prise de comprimés d’hormones identiques à celles que produisent naturellement vos ovaires. « Ces hormones, au minimum, épaississent les sécrétions à l’entrée de l’utérus et empêchent les spermatozoïdes de passer ; au maximum, elles font croire au corps de l’utilisatrice qu’elle est déjà enceinte, ce qui endort l’ovulation, car une femme enceinte n’ovule pas », note le Docteur Martin Winckler dans son livre « Choisir sa contraception ». On distingue trois types de contraception orale : les pilules « combinées » (comprenant un progestatif et un oestrogène, l’éthinyloestradiol) ; les pilules progestatives microdosées (ne comprenant qu’un progestatif) et des progestatifs utilisés en thérapeutique. Une idée reçue Dans ce contexte, on a tendance à croire que la pilule fait grossir. Mais c’est faux. Elle ne fait pas prendre du poids. Il arrive pourtant que certaines d’entre vous épaississent alors qu’elles sont sous pilule (ou avec une contraception hormonale). Alors que ce n’est pas du tout le cas pour d’autres. « Les substances contenues dans la pilule et dans toutes les méthodes contraceptives hormonales reproduisent l’état de la grossesse (c’est par ce mécanisme qu’elles endorment l’ovulation), relève notre médecin généraliste. En agissant sur le cerveau pour mettre l’ovulation au repos, elles peuvent aussi déclencher des phénomènes observés pendant la grossesse : nausées ou gonflement des seins, mais aussi augmentation de l’appétit et prise de poids ». Parmi les candidates à la prise de poids, on distingue les adolescentes entre 15 et 20 ans, et ce, avec ou sans pilule. De même, on peut citer les femmes de plus de 25 ans qui ont déjà eu au moins un enfant. Celles qui ont franchement grossi au cours de leur première grossesse risquent de prendre à nouveau des kilos une fois qu’elles seront sous pilule. Par ailleurs, les femmes de plus de 25 ans qui ne sont jamais tombées enceintes n’ont pas de prise de poids prévisible à moins qu’elles aient une tendance à l’embonpoint, d’origine personnelle ou familiale. « Le plus souvent, la prise de poids liée à la pilule est rapide (quelques semaines ou quelques mois), souligne le Docteur Martin Winckler. Si, au bout de six mois, le poids est resté stable, il n’y a plus de risque. Il faudrait ajouter que l’implant « Implanon » et le DIU hormonal « Mirena » (dispositif intra-utérin ou stérilet) ont également pour effet de favoriser la prise de poids chez les femmes sujettes à ce risque pendant leur grossesse ». Le DIU ( stérilet ) au cuivre, une solution en cas de surpoids Avec ou sans pilule, vous devez faire attention à votre alimentation. Si vous avez l’impression que vous avez plus d’appétit quand vous êtes sous pilule, évitez les sucreries en tout genre. La pilule ne fournit pas de calories.Mais elle peut agir sur leur assimilation par l’organisme et inciter à la mise en réserve. Souvent, les jeunes femmes ont tendance à se tourner vers une autre pilule. Et elles ont raison. Sachant qu’il n’existe pas de pilules qui font prendre moins de poids que d’autres.Mais il y a un intérêt à tester plusieurs pilules sur la durée avec les conseils de son gynécologue. « Contrairement à ce que prétendent certains fabricants, aucune pilule n’a pour effet de faire perdre du poids, ajoute le Docteur Martin Winckler. Jasmine (et ses génériques) et sa dérivée Jasminelle ont été lancées dans certains pays comme étant des pilules « qui faisaient perdre du poids ». Il n’en est rien. En réalité, elles contiennent une molécule qui a un effet diurétique : elles font perdre de l’eau et du sel aux femmes qui ont tendance à faire de la rétention d’eau en fin de cycle (juste avant les règles). Elles n’ont d’intérêt que pour ces femmes-là, car le « poids » dont vous voulez vous débarrasser n’est pas lié à une rétention d’eau. Ne demandez donc pas « la pilule qui fait perdre du poids » à votre médecin car, en outre, Jasmine provoquerait plus d’accidents vasculaires (phlébites et embolies pulmonaires) que les autres pilules… ». Si vous devez perdre du poids, mieux vaut éviter les méthodes susceptibles de vous faire grossir ou de vous empêcher d’éliminer vos kilos disgracieux (l’implant, en particulier…). « La méthode contraceptive la plus logique à utiliser en cas de surpoids est le DIU au cuivre : il ne délivre pas d’hormones et ne modifie pas le cycle. Et vous pouvez suivre le régime que vous voulez », rappelle notre médecin généraliste. L’avis du Docteur Christian Jamin, Gynécologue Le poids est constitué principalement d’os, de graisse et d’eau. Les pilules ne font donc pas prendre de graisse. En revanche, celles avec des oestrogènes augmentent un petit peu la fuite hydrique hors des vaisseaux. Ce qui entraîne une légère rétention d’eau. Ce phénomène ajoute quelques centaines de grammes (environ 350 g en moyenne) au poids de la femme, qui disparaissent avec les règles. Mais il est souvent mal perçu de sa part. Car il donne une impression de lourdeur, de douleur aux jambes et de gonflement qu’elle associe volontiers dans son imaginaire à une prise de poids. Il est donc important de bien distinguer la différence entre la prise de poids liée à la graisse qui peut être constante en dehors de cette problématique contraceptive et la très légère augmentation de poids liée à la rétention d’eau qui est plus fluctuante et disparaît avec les règles. Actuellement, il existe deux types de contraception nouveaux qui n’ont pas cet inconvénient de rétention hydrique : les pilules avec un produit très légèrement diurétique (Jasmine ou Jasminelle). Elles ont été présentées comme les pilules qui faisaient maigrir. Ce qui est une escroquerie. Elles empêchent seulement cette petite rétention hydrique qu’on observe en fin de cycle. L’autre mode de contraception est l’anneau vaginal (Nuvaring) qui ne donne pas non plus de rétention hydrique, car il est très faiblement dosé. Précision concernant le contrôle du cholestérol La prise d’oestrogènes à fortes doses par voie orale entraîne une augmentation de la production de cholestérol par le foie qui, normalement, est compensée par une augmentation de son épuration à ce même niveau. Par conséquent, la pilule ne fait pas monter le taux de cholestérol, sauf chez les personnes génétiquement prédisposées. Dans ce cas, elle élève davantage sa production que l’épuration. On observe alors une montée du taux de cholestérol chez ces personnes. La pilule vient révéler une anomalie génétique sous-jacente. Il est donc essentiel de vérifier le taux de cholestérol trois à quatre mois après le début de la prise de la pilule.