Que ce soit parce qu'elles en avaient assez de se priver, ou bien parce que leurs régimes, trop restrictifs et trop nombreux, ont perdu toute efficacité, certaines personnes ont décidé de cesser de vouloir maigrir. Comment font ces femmes qui s'acceptent et s'épanouissent dans une société qui célèbre unanimement la minceur, alors qu'elles accusent un surpoids de 10, 20, 30 kg ou plus ? En dehors du bénéfice psychologique de parvenir à s'aimer avec un corps qui ne correspond pas aux normes actuelles, y a-t-il un réel danger pour sa santé ? Réponses dans ce dossier.
Qu'est-ce qu'une femme belle ? C'est une femme qui, avant tout, se sent bien dans sa peau, et tire pleinement partie de son potentiel de séduction. Or, pour cela, il faut aussi que l'image que lui renvoient les autres soit flatteuse. Seulement, dans nos sociétés occidentales, si la femme affiche un surpoids par rapport à la norme édictée et véhiculée par les médias, elle pourra être considérée comme laide. Il n'en a évidemment pas toujours été ainsi, et à d'autres époques on a célébré les femmes plantureuses, comme en témoignent les peintures de Rubens, Rembrandt ou encore Michel-Ange. Céline, 27 ans, mannequin comédienne et chanteuse, 1m71 pour 98 kg. « J'ai commencé à prendre du poids à l'âge de 16 ans, suite à la prise de la pilule, qui m'a fait prendre 10 kg en un seul mois. S'en sont suivies des pertes et des reprises de poids, en fonction des médecins que j'allais voir. La plupart me prescrivaient des régimes sans même me faire d'analyses hormonales, alors que le problème se situait, entre autres, au niveau de ma thyroïde. Il y a trois ans, je chantais dans le groupe Taï Phong (groupe qui a vu débuter Jean-Jacques Goldman), et n'envisageais pas de me lancer dans une carrière solo avant d'avoir perdu du poids. Puis mon petit-ami m'a demandée en mariage, et j'ai visité tous les magasins de robes de mariées parisiens mais, comme je fais une taille 50, je n'ai rien trouvé. Je n'ai pas voulu prendre le risque de commander un modèle sans savoir ce que ça pouvait donner sur moi, donc j'ai fait appel à une couturière et j'ai dessiné ma robe. Mais pour y parvenir, j'ai eu besoin de m'aider d'une silhouette de femme ronde, et je suis allée sur internet pour la trouver. Je ne l'ai pas trouvée, mais en revanche, j'ai découvert la communauté des rondes dont j'ignorais l'existence, notamment sur le site « rondeetjolie.com ». Je me suis rendue compte qu'il existait aussi des concours de beauté pour ces femmes là, et j'ai trouvé cela tellement positif que je me suis inscrite au concours de Miss Ronde 2003 (je suis arrivée 3e) ! Suite à cette inscription, j'ai reçu près de 500 mails de soutien en l'espace de 2 mois. Cela m'a fait réfléchir, et j'ai demandé à mon mari quel serait son sentiment si j'arrêtais les régimes et m'acceptais avec ce poids dont j'ai besoin pour exister dans ma profession. Il m'a répondu que je serais beaucoup plus détendue et moins stressée par mon contrôle permanent de la nourriture. Aujourd'hui, il est très fier de moi et soutient énormément ma carrière. Suite au concours de Miss, j'ai été contactée par un certain Didier Mary qui m'a proposé de faire des photos. Au début j'étais très réticente, mais nous nous sommes tout de même rencontrés, et nous avons fait quelques essais de portraits, tellement convaincants que mon mari a créé un site internet spécialement pour les exposer.
Suite à cela, j'ai été contactée par de nombreux photographes. Cela m'a permis d'enrichir mon book et de me présenter à des agences de mannequins et de comédiens, puis de passer des castings. Aujourd'hui, j'ai tourné plusieurs films, je tiens le rôle principal d'un moyen métrage qui va être tourné en septembre, je prépare une pièce de théâtre et un album pour 2004. Mon message est le suivant : cessons donc de catégoriser les gens en fonction de critères aussi subjectifs que leur poids, leur taille, ou leur couleur, et intéressons-nous plutôt à ce qu'ils sont à l'intérieur, car chacun est beau dans sa différence. » (pour visiter le site internet de Céline : www.celinelombard.fr.st) Une société qui prône la minceur à tout prix De nos jours, les femmes rondes sont célébrées et surtout recherchées sous d'autres latitudes : les Africaines sont séduisantes car délicieusement girondes sous leurs boubous, et les femmes orientales attisent l'oeil alangui de leur aimé par un nombril rebondi. Comme l'a rapporté un jour un mannequin connu lors d'une interview, un top model qui sera considérée comme une des plus belles filles du monde en Occident, sera vue comme un laideron rachitique en changeant de continent. Pour entrer dans les normes, on attend donc du corps humain, en fonction des modes qui passent, qu'il se plie aux mêmes exigences que celles qu'on attendrait d'un produit marketing, modulable et adaptable au gré des tendances. Or, si l'on admet que la valeur d'un être humain ne devrait pas s'attacher à la couleur de ses cheveux ou à celle de sa peau, il devrait en être de même pour son poids : ce qui n'est évidemment pas le cas dans la vie quotidienne. Les personnes fortes sont souvent victimes de discrimination car elles vivent dans une société où la minceur est valorisée à outrance. Puisque tout le monde peut être mince s'il le veut (dans l'inconscient collectif, il suffit juste pour cela de faire un régime), on accuse les gros d'être passifs, paresseux, de manquer de volonté et de se laisser aller. Bref, de mériter ce qui leur arrive. Profitons-en pour rappeler le but de notre magazine : Savoir Maigrir ne prône pas la minceur à tout prix et contre sa nature, mais se veut un outil d'aide à la perte de poids, avec ses conseils, ses menus équilibrés et ses témoignages. Dans notre mensuel, la ligne éditoriale du magazine vise essentiellement à l'amélioration de son hygiène de vie, de sa confiance en soi et ce, quel que soit son poids.
Témoignage d'Anne, 42 ans, restauratrice de tableaux, 1m62 pour 110 kg, adhérente de l'association Allégro Fortissimo. « Je suis devenue obèse, comme la plupart des gens de ma génération, par l'accumulation de régimes mal maîtrisés. Au départ, j'étais une jolie fille potelée de 8 ans qui a subi de nombreux régimes violents, imposés par ses parents et le milieu médical, alors que son surpoids n'était que de 5 kg. Les années passant j'ai trouvé intolérable la discrimination faite aux gens par rapport à leur physique en général, la norme occidentale étant très restrictive pour toutes les particularités physiques. Les médecins du G.R.O.S. (groupement de réflexion sur l'obésité et le surpoids) ont tiré comme conclusions que des années passées à pratiquer des régimes drastiques avaient une responsabilité importante dans la survenue de l'obésité actuelle. Il faudrait faire évoluer le regard des gens sur le fait que la beauté est multi-formes, multi-couleurs et multi-cultures, ainsi on se permettrait moins de vouloir intervenir sur le patrimoine physiologique des gens. Que la grande obésité entraîne des problèmes de santé, c'est indéniable, mais il ne faut pas confondre beauté et poids, et dans certaines cultures une femme ronde est considérée comme très belle. Tous ces principes, je les ai appliqués à moi-même, après avoir souffert de dépression lorsque j'étais encore influencée par mon environnement. Aujourd'hui, je vis heureuse avec un homme qui m'aime avec mes rondeurs. J'ai eu une vie sexuelle et sentimentale très riche, à partir du moment où je me suis acceptée telle que j'étais, car j'ai employé l'énergie que je gaspillais à vouloir transformer mon corps à l'enrichissement de mon cercle de relations. Je pense que lorsqu'on s'accepte avec sa différence, quelle qu'elle soit, on finit par attirer beaucoup plus les gens que le contraire. Et honnêtement, je me trouve belle comme je suis, même s'il me reste encore quelques complexes qui me semblent humains. Et si certaines personnes ne sont pas de cet avis, ça ne me dérange pas car je sais aussi que l'on ne peut pas plaire à tout le monde. » Est-il dangereux de vouloir rester gros ? Les problèmes de surpoids ne sont pas seulement d'ordre esthétique. Il peuvent aussi entraîner des risques pour la santé. Nous avons posé quelques questions à ce sujet au docteur Jean-Philippe Zermatti, médecin nutritionniste à Paris. Savoir Maigrir : Qu'est-ce qui pousse les gens à se mettre au régime ? Dr. Jean-Philippe Zermatti : Les gens veulent maigrir pour se rapprocher de canons esthétiques qu'ils ne pourront jamais atteindre. Il y a un grand décallage entre le corps des gens et celui des top model. Pour prendre un exemple, l'IMC (indice de masse corporelle) moyen d'une femme de taille moyenne en France se situe aux alentours de 23. Celui d'un top model se situe aux alentours de 17. Soit environ 15 kg de différence ! Il faut savoir qu'il y a 10 % de gens obèses en France, 20 % qui sont en surpoids, et 70 % de personnes qui ne sont pas satisfaites de leur poids et qui font ou ont fait un régime. C'est énorme. S.M. : A partir de quel moment doit-on s'inquiéter de son surpoids ? Dr J.-P. Z. : Le surpoids n'est pas quelque chose de très dangereux. C'est essentiellement un facteur de risques, au même titre que la sédentarité ou que le cholestérol. On considère, au-delà d'un certain IMC, que le risque statistique de certaines maladies augmente. Cela ne veut pas dire qu'elles apparaîtront forcément. Jusqu'à un IMC de 27, on considère qu'il y a généralement peu d'incidences sur la santé. S.M. : Quelles sont les complications possibles ? Dr J.-P. Z. : Sur le plan mécanique, les problèmes sont surtout articulaires, notamment au niveau des genoux qui sont les articulations portantes les plus fragiles. Il y a également des complications métaboliques avec l'apparition de cholestérol, de diabète, de triglycérides... Et puis il y a les complications cardiaques, pulmonaires (apnée du sommeil), les cancers, les problèmes dermatologiques... S.M. : Le régime est-il la seule solution ? Dr J.-P. Z. : Le régime est une solution intolérable sur le long terme. La plupart des gens regrossissent après avoir maigri suite à un régime. A l'hôpital, les statistiques sont de 95 % d'échecs. Ces chiffres sont à nuancer, car l'hôpital traite les cas les plus graves. En dehors de cette structure, le taux passe à 70 % d'échecs, c'est à dire que des gens vont reprendre leur ancien poids, voire même dépasser leur poids de départ. En médecine, on ne peut pas se contenter des 30 % de réussite. Aucun médicament n'obtiendrait une autorisation de mise sur le marché avec 70 % d'échecs et de complications. Imposer un contrôle drastique sur son alimentation n'est pas supportable sur le long terme. Les gens qui n'ont aucun problème de poids ne s'y prennent pas comme ça : ils mangent normalement et se régulent d'eux-mêmes sur la quantité et sur la qualité. La régulation est une sorte de contrôle inconscient. Pour les personnes en surpoids, il faut restaurer cette régulation par des traitements psychologiques ciblés sur le comportement alimentaire.
Témoignage d'Eric, 37 ans, agent de sécurité, 1m80 pour 147 kg, adhérent de l'association Allegro Fortissimo. « Je suis en surpoids depuis une dizaine d'années, et je ne l'ai jamais accepté. J'ai réussi à faire des régimes qui m'ont permis de perdre beaucoup de poids, mais je n'arrivais jamais à me stabiliser ensuite sur le long terme. Me sentir différent des autres m'a été parfois extrêmement dur. Un jour, s'est opéré en moi une prise de conscience qui m'a fait comprendre que je n'avais pas le choix et que je devais m'accepter. Sinon, je vivrais toute ma vie malheureux. Adhérer à une association m'a sauvé, parce que j'étais un gros isolé et que j'ai trouvé dans cette structure des gens qui s'acceptaient ou qui en prenaient le chemin. J'ai donc voulu suivre ce combat d'acceptation des gros dans la société. Et je dis « gros » et non pas « personne forte » parce que c'est ce que l'on est et qu'on ne cherche pas à se cacher derrière les mots. Aujourd'hui, je vis complètement normalement et j'ai repris suffisamment confiance en moi pour trouver une compagne car je projette désormais une autre image de moi. En m'acceptant, les autres m'ont accepté plus facilement. J'aimerais que « les normaux », c'est à dire les personnes minces, fassent un jour l'expérience de l'exclusion pour comprendre ce que peuvent ressentir les gens comme nous. Si des associations se sont créées, c'est bien qu'il y avait une raison et que les gros ont eu besoin de se retrouver entre eux pour sortir de leur isolement. Aujourd'hui, le combat n'est plus de se retrouver entre nous, mais de créer un mélange qui permettrait aux « normaux » de venir vers nous, et nous vers eux, sans qu'il n'y ait de différences. ». 10 règles d'or pour s'assumer avec son surpoids • 1 Portez toujours des vêtements à votre goût et surtout qui vous mettent en valeur. Soyez toujours soignée, coquette, tirée à quatre épingles, bref, trouvez-vous belle et les autres vous trouveront belle. • 2 Focalisez-vous sur le meilleur de vous-même, regardez quelles sont vos plus belles qualités, vos plus beaux atouts et attardez-vous dessus. Vous trouvez cela difficile ? Pas forcément : vous savez déjà le faire en vous fixant sur vos défauts et en sous-estimant vos qualités. Il suffit juste d'inverser la tendance. • 3 Observez les gens que vous aimez, vos proches, vos amis, et aussi les personnes dont le travail a changé le monde et que vous admirez. Leurs imperfections physiques ont-elles de l'importance dans l'affection ou l'intérêt que vous leur portez ? Non, évidemment. • 4 Regardez la vie autour de vous, trouvez-la belle. Et rappelez-vous que c'est ce corps que vous détestez qui vous permet de contempler la magie d'un coucher de soleil sur la mer, de sentir le parfum capiteux d'une fleur, de goûter la saveur d'une glace à la pistache, de tenir dans vos bras un enfant endormi, d'entendre votre fils vous dire « maman je t'aime »... Votre corps est avant tout une enveloppe charnelle qui permet à votre esprit d'avoir accès au monde extérieur. Que ce corps soit beau ou laid, attirant ou complexant n'y change strictement rien. • 5 Rappelez-vous que la vie est trop courte pour ne pas en profiter à cause de quelques kilos en trop. Ce n'est pas en restant terrée chez soi à ressasser ses névroses et à complexer sur son physique que ses problèmes s'envoleront. Vous avez le droit de jouir de la vie au même titre que n'importe qui d'autre, de pratiquer les activités qui vous plaisent ou qui vous font envie. Comme chacun, vous avez des rêves et le but d'une vie est de tenter de les réaliser. • 6 Que vous ne vous trouviez pas belle ne signifie pas nécessairement que les autres vous trouvent laide ! Non, les hommes ne sont pas tous séduits par des clônes de Barbie, bien au contraire. C'est mal connaître la nature humaine que de penser que le charme de quelqu'un ne peut pas provenir de ses fossettes craquantes, de son regard profond, de ses cheveux soyeux, de sa brillante personnalité ou encore de sa culture sans failles... Gardez toujours à l'esprit que celles qui sont belles pour certains sont laides pour d'autres, et vice-versa. • 7 Votre corps est votre allié, pas un ennemi qu'il faut combattre et sur lequel s'acharner. • 8 Otez-vous de l'esprit que seuls les gens minces réussissent à obtenir ce qu'ils veulent. Les minces se diront qu'ils ont raté telles choses parce qu'ils n'étaient pas assez riches, les gens riches se diront qu'ils ont échoué parce qu'ils n'étaient pas assez aimés... chacun trouvera une explication pour justifier ses échecs. Ne vous trouvez pas d'excuses : si vous ne parvenez pas à réaliser ce qui vous fait rêver, c'est seulement parce que vous n'y avez pas mis assez d'énergie, et non parce que vous êtes gros. • 9 Si vous avez des pustules sur le visage, une haleine chargée, un oeil de verre, des dents gâtées, des pellicules et que vous êtes atteinte d'un surpoids, alors on peut effectivement considérer que vous êtes laide. Si vous avez juste un surpoids, alors vous êtes ronde, mais pas laide. Et c'est toute la différence. • 10 Prenez soin de votre corps, faites de l'exercice, de la marche pour vous tonifier. Ne négligez pas votre santé, faites les examens appropriés, bref, ne vous laissez pas aller car vous avez encore de merveilleuses choses à vivre et surtout à découvrir.
Témoignage de Carmelle, 29 ans, mannequin et comédienne, 1m76 pour 95 kg, fréquente le site internet rondeetjolie.com : « Je suis en surpoids depuis l'âge de 20 ans. Lors de grandes vacances aux Antilles, j'ai pris 20 kg en quelques mois et à mon retour, j'ai dû changer complètement ma garde robe. Au début, je me suis trouvée très complexée et j'ai enchaîné les régimes, les techniques de sudation, etc...Un jour j'en ai eu marre de tout ça, et comme j'étais très coquette, je me suis rendue compte que je continuais à plaire malgré tout. J'avais l'habitude de poser déjà pour des photos. Lors d'une soirée, j'ai rencontré le chanteur Carlos et je lui ai demandé s'il ne connaissait pas des organisateurs de défilés de mode pour grandes tailles. Il m'a donné les coordonnées d'Edmond Boublil, le styliste de la marque « Ronde de nuit », m'a convoquée pour un casting, et ma carrière a démarré. J'ai fait des défilés un peu partout en Europe, en France, j'ai fait quelques télés et j'ai fini par être repérée par des agences de comédiens mannequins. Je fais depuis des années des apparitions dans des films ou des publicités. En ce qui concerne ma vie sentimentale, même si je suis toujours en quête du grand amour, je ne manque pas de prétendants ! » Les mouvements qui se sont créés Aux Etats-Unis, des mouvements de Size Acceptance ont vu le jour depuis les années 70. Ces associations (la principale en France est Allegro Fortissimo) militent pour l'acceptation des personnes obèses, luttent contre la dictature de la minceur dans les médias, et proposent des activités que les personnes en surpoids peuvent pratiquer entre elles. Le simple fait de pouvoir se retrouver dans une communauté où elles n'auront pas à subir de quolibets ou de rejet font que ces personnes revivent littéralement, après parfois des années d'isolement ou de replis sur elles-mêmes. De plus, les adhérents de ces associations Outre Atlantique travaillent énormément sur l'acquisition de la confiance en soi qui leur fait cruellement défaut. La NAAFA (National Association to Advance Fat Acceptance : association nationale pour promouvoir l'acceptation des personnes grosses), une des principales associations de ce type aux Etats-Unis, dénonce également les effets dévastateurs sur la santé qu'ont eu certains médicaments amaigrissants (extraits thyroïdiens, amphétamines, dexfenfluramine...). Il est vrai que les personnes obèses veulent avant tout maigrir, quitte à mettre leur vie en danger, pour échapper à la discrimination dont elles sont l'objet à cause de leur poids, et que c'est en conséquence le regard qui leur est porté par la société qui doit changer.
Témoignage de Consuelo, 34 ans, secrétaire, 1m65 pour 120 kg, adhérente de l'association Allegro Fortissimo. « Depuis mon adhésion à l'association, j'ai complètement changé ma façon de voir la vie en côtoyant des gens dans mon cas qui s'assumaient sans problèmes. J'ai acquis un optimisme et une façon de relativiser les choses que je ne possédais pas avant. Par exemple, lorsqu'une personne me regarde méchamment dans le métro parce que je prends toute la place sur mon siège, je reste zen et je lui souris, ce qui va la déstabiliser, plutôt que d'être moi-même mal à l'aise. Idem en discothèque, si j'entends un quelconque commentaire sur mon poids, je ne complexe plus du tout et je danse de plus belle. Voilà une façon épanouissante de voir la vie, qui a une répercussion positive sur mon travail et sur ma vie personnelle »..
Témoignage d'Anne, 42 ans, restauratrice de tableaux, 1m62 pour 110 kg, adhérente de l'association Allégro Fortissimo. « Je suis devenue obèse, comme la plupart des gens de ma génération, par l'accumulation de régimes mal maîtrisés. Au départ, j'étais une jolie fille potelée de 8 ans qui a subi de nombreux régimes violents, imposés par ses parents et le milieu médical, alors que son surpoids n'était que de 5 kg. Les années passant j'ai trouvé intolérable la discrimination faite aux gens par rapport à leur physique en général, la norme occidentale étant très restrictive pour toutes les particularités physiques. Les médecins du G.R.O.S. (groupement de réflexion sur l'obésité et le surpoids) ont tiré comme conclusions que des années passées à pratiquer des régimes drastiques avaient une responsabilité importante dans la survenue de l'obésité actuelle. Il faudrait faire évoluer le regard des gens sur le fait que la beauté est multi-formes, multi-couleurs et multi-cultures, ainsi on se permettrait moins de vouloir intervenir sur le patrimoine physiologique des gens. Que la grande obésité entraîne des problèmes de santé, c'est indéniable, mais il ne faut pas confondre beauté et poids, et dans certaines cultures une femme ronde est considérée comme très belle. Tous ces principes, je les ai appliqués à moi-même, après avoir souffert de dépression lorsque j'étais encore influencée par mon environnement. Aujourd'hui, je vis heureuse avec un homme qui m'aime avec mes rondeurs. J'ai eu une vie sexuelle et sentimentale très riche, à partir du moment où je me suis acceptée telle que j'étais, car j'ai employé l'énergie que je gaspillais à vouloir transformer mon corps à l'enrichissement de mon cercle de relations. Je pense que lorsqu'on s'accepte avec sa différence, quelle qu'elle soit, on finit par attirer beaucoup plus les gens que le contraire. Et honnêtement, je me trouve belle comme je suis, même s'il me reste encore quelques complexes qui me semblent humains. Et si certaines personnes ne sont pas de cet avis, ça ne me dérange pas car je sais aussi que l'on ne peut pas plaire à tout le monde. » Est-il dangereux de vouloir rester gros ? Les problèmes de surpoids ne sont pas seulement d'ordre esthétique. Il peuvent aussi entraîner des risques pour la santé. Nous avons posé quelques questions à ce sujet au docteur Jean-Philippe Zermatti, médecin nutritionniste à Paris. Savoir Maigrir : Qu'est-ce qui pousse les gens à se mettre au régime ? Dr. Jean-Philippe Zermatti : Les gens veulent maigrir pour se rapprocher de canons esthétiques qu'ils ne pourront jamais atteindre. Il y a un grand décallage entre le corps des gens et celui des top model. Pour prendre un exemple, l'IMC (indice de masse corporelle) moyen d'une femme de taille moyenne en France se situe aux alentours de 23. Celui d'un top model se situe aux alentours de 17. Soit environ 15 kg de différence ! Il faut savoir qu'il y a 10 % de gens obèses en France, 20 % qui sont en surpoids, et 70 % de personnes qui ne sont pas satisfaites de leur poids et qui font ou ont fait un régime. C'est énorme. S.M. : A partir de quel moment doit-on s'inquiéter de son surpoids ? Dr J.-P. Z. : Le surpoids n'est pas quelque chose de très dangereux. C'est essentiellement un facteur de risques, au même titre que la sédentarité ou que le cholestérol. On considère, au-delà d'un certain IMC, que le risque statistique de certaines maladies augmente. Cela ne veut pas dire qu'elles apparaîtront forcément. Jusqu'à un IMC de 27, on considère qu'il y a généralement peu d'incidences sur la santé. S.M. : Quelles sont les complications possibles ? Dr J.-P. Z. : Sur le plan mécanique, les problèmes sont surtout articulaires, notamment au niveau des genoux qui sont les articulations portantes les plus fragiles. Il y a également des complications métaboliques avec l'apparition de cholestérol, de diabète, de triglycérides... Et puis il y a les complications cardiaques, pulmonaires (apnée du sommeil), les cancers, les problèmes dermatologiques... S.M. : Le régime est-il la seule solution ? Dr J.-P. Z. : Le régime est une solution intolérable sur le long terme. La plupart des gens regrossissent après avoir maigri suite à un régime. A l'hôpital, les statistiques sont de 95 % d'échecs. Ces chiffres sont à nuancer, car l'hôpital traite les cas les plus graves. En dehors de cette structure, le taux passe à 70 % d'échecs, c'est à dire que des gens vont reprendre leur ancien poids, voire même dépasser leur poids de départ. En médecine, on ne peut pas se contenter des 30 % de réussite. Aucun médicament n'obtiendrait une autorisation de mise sur le marché avec 70 % d'échecs et de complications. Imposer un contrôle drastique sur son alimentation n'est pas supportable sur le long terme. Les gens qui n'ont aucun problème de poids ne s'y prennent pas comme ça : ils mangent normalement et se régulent d'eux-mêmes sur la quantité et sur la qualité. La régulation est une sorte de contrôle inconscient. Pour les personnes en surpoids, il faut restaurer cette régulation par des traitements psychologiques ciblés sur le comportement alimentaire.
Témoignage d'Eric, 37 ans, agent de sécurité, 1m80 pour 147 kg, adhérent de l'association Allegro Fortissimo. « Je suis en surpoids depuis une dizaine d'années, et je ne l'ai jamais accepté. J'ai réussi à faire des régimes qui m'ont permis de perdre beaucoup de poids, mais je n'arrivais jamais à me stabiliser ensuite sur le long terme. Me sentir différent des autres m'a été parfois extrêmement dur. Un jour, s'est opéré en moi une prise de conscience qui m'a fait comprendre que je n'avais pas le choix et que je devais m'accepter. Sinon, je vivrais toute ma vie malheureux. Adhérer à une association m'a sauvé, parce que j'étais un gros isolé et que j'ai trouvé dans cette structure des gens qui s'acceptaient ou qui en prenaient le chemin. J'ai donc voulu suivre ce combat d'acceptation des gros dans la société. Et je dis « gros » et non pas « personne forte » parce que c'est ce que l'on est et qu'on ne cherche pas à se cacher derrière les mots. Aujourd'hui, je vis complètement normalement et j'ai repris suffisamment confiance en moi pour trouver une compagne car je projette désormais une autre image de moi. En m'acceptant, les autres m'ont accepté plus facilement. J'aimerais que « les normaux », c'est à dire les personnes minces, fassent un jour l'expérience de l'exclusion pour comprendre ce que peuvent ressentir les gens comme nous. Si des associations se sont créées, c'est bien qu'il y avait une raison et que les gros ont eu besoin de se retrouver entre eux pour sortir de leur isolement. Aujourd'hui, le combat n'est plus de se retrouver entre nous, mais de créer un mélange qui permettrait aux « normaux » de venir vers nous, et nous vers eux, sans qu'il n'y ait de différences. ». 10 règles d'or pour s'assumer avec son surpoids • 1 Portez toujours des vêtements à votre goût et surtout qui vous mettent en valeur. Soyez toujours soignée, coquette, tirée à quatre épingles, bref, trouvez-vous belle et les autres vous trouveront belle. • 2 Focalisez-vous sur le meilleur de vous-même, regardez quelles sont vos plus belles qualités, vos plus beaux atouts et attardez-vous dessus. Vous trouvez cela difficile ? Pas forcément : vous savez déjà le faire en vous fixant sur vos défauts et en sous-estimant vos qualités. Il suffit juste d'inverser la tendance. • 3 Observez les gens que vous aimez, vos proches, vos amis, et aussi les personnes dont le travail a changé le monde et que vous admirez. Leurs imperfections physiques ont-elles de l'importance dans l'affection ou l'intérêt que vous leur portez ? Non, évidemment. • 4 Regardez la vie autour de vous, trouvez-la belle. Et rappelez-vous que c'est ce corps que vous détestez qui vous permet de contempler la magie d'un coucher de soleil sur la mer, de sentir le parfum capiteux d'une fleur, de goûter la saveur d'une glace à la pistache, de tenir dans vos bras un enfant endormi, d'entendre votre fils vous dire « maman je t'aime »... Votre corps est avant tout une enveloppe charnelle qui permet à votre esprit d'avoir accès au monde extérieur. Que ce corps soit beau ou laid, attirant ou complexant n'y change strictement rien. • 5 Rappelez-vous que la vie est trop courte pour ne pas en profiter à cause de quelques kilos en trop. Ce n'est pas en restant terrée chez soi à ressasser ses névroses et à complexer sur son physique que ses problèmes s'envoleront. Vous avez le droit de jouir de la vie au même titre que n'importe qui d'autre, de pratiquer les activités qui vous plaisent ou qui vous font envie. Comme chacun, vous avez des rêves et le but d'une vie est de tenter de les réaliser. • 6 Que vous ne vous trouviez pas belle ne signifie pas nécessairement que les autres vous trouvent laide ! Non, les hommes ne sont pas tous séduits par des clônes de Barbie, bien au contraire. C'est mal connaître la nature humaine que de penser que le charme de quelqu'un ne peut pas provenir de ses fossettes craquantes, de son regard profond, de ses cheveux soyeux, de sa brillante personnalité ou encore de sa culture sans failles... Gardez toujours à l'esprit que celles qui sont belles pour certains sont laides pour d'autres, et vice-versa. • 7 Votre corps est votre allié, pas un ennemi qu'il faut combattre et sur lequel s'acharner. • 8 Otez-vous de l'esprit que seuls les gens minces réussissent à obtenir ce qu'ils veulent. Les minces se diront qu'ils ont raté telles choses parce qu'ils n'étaient pas assez riches, les gens riches se diront qu'ils ont échoué parce qu'ils n'étaient pas assez aimés... chacun trouvera une explication pour justifier ses échecs. Ne vous trouvez pas d'excuses : si vous ne parvenez pas à réaliser ce qui vous fait rêver, c'est seulement parce que vous n'y avez pas mis assez d'énergie, et non parce que vous êtes gros. • 9 Si vous avez des pustules sur le visage, une haleine chargée, un oeil de verre, des dents gâtées, des pellicules et que vous êtes atteinte d'un surpoids, alors on peut effectivement considérer que vous êtes laide. Si vous avez juste un surpoids, alors vous êtes ronde, mais pas laide. Et c'est toute la différence. • 10 Prenez soin de votre corps, faites de l'exercice, de la marche pour vous tonifier. Ne négligez pas votre santé, faites les examens appropriés, bref, ne vous laissez pas aller car vous avez encore de merveilleuses choses à vivre et surtout à découvrir.
Témoignage de Carmelle, 29 ans, mannequin et comédienne, 1m76 pour 95 kg, fréquente le site internet rondeetjolie.com : « Je suis en surpoids depuis l'âge de 20 ans. Lors de grandes vacances aux Antilles, j'ai pris 20 kg en quelques mois et à mon retour, j'ai dû changer complètement ma garde robe. Au début, je me suis trouvée très complexée et j'ai enchaîné les régimes, les techniques de sudation, etc...Un jour j'en ai eu marre de tout ça, et comme j'étais très coquette, je me suis rendue compte que je continuais à plaire malgré tout. J'avais l'habitude de poser déjà pour des photos. Lors d'une soirée, j'ai rencontré le chanteur Carlos et je lui ai demandé s'il ne connaissait pas des organisateurs de défilés de mode pour grandes tailles. Il m'a donné les coordonnées d'Edmond Boublil, le styliste de la marque « Ronde de nuit », m'a convoquée pour un casting, et ma carrière a démarré. J'ai fait des défilés un peu partout en Europe, en France, j'ai fait quelques télés et j'ai fini par être repérée par des agences de comédiens mannequins. Je fais depuis des années des apparitions dans des films ou des publicités. En ce qui concerne ma vie sentimentale, même si je suis toujours en quête du grand amour, je ne manque pas de prétendants ! » Les mouvements qui se sont créés Aux Etats-Unis, des mouvements de Size Acceptance ont vu le jour depuis les années 70. Ces associations (la principale en France est Allegro Fortissimo) militent pour l'acceptation des personnes obèses, luttent contre la dictature de la minceur dans les médias, et proposent des activités que les personnes en surpoids peuvent pratiquer entre elles. Le simple fait de pouvoir se retrouver dans une communauté où elles n'auront pas à subir de quolibets ou de rejet font que ces personnes revivent littéralement, après parfois des années d'isolement ou de replis sur elles-mêmes. De plus, les adhérents de ces associations Outre Atlantique travaillent énormément sur l'acquisition de la confiance en soi qui leur fait cruellement défaut. La NAAFA (National Association to Advance Fat Acceptance : association nationale pour promouvoir l'acceptation des personnes grosses), une des principales associations de ce type aux Etats-Unis, dénonce également les effets dévastateurs sur la santé qu'ont eu certains médicaments amaigrissants (extraits thyroïdiens, amphétamines, dexfenfluramine...). Il est vrai que les personnes obèses veulent avant tout maigrir, quitte à mettre leur vie en danger, pour échapper à la discrimination dont elles sont l'objet à cause de leur poids, et que c'est en conséquence le regard qui leur est porté par la société qui doit changer.
Témoignage de Consuelo, 34 ans, secrétaire, 1m65 pour 120 kg, adhérente de l'association Allegro Fortissimo. « Depuis mon adhésion à l'association, j'ai complètement changé ma façon de voir la vie en côtoyant des gens dans mon cas qui s'assumaient sans problèmes. J'ai acquis un optimisme et une façon de relativiser les choses que je ne possédais pas avant. Par exemple, lorsqu'une personne me regarde méchamment dans le métro parce que je prends toute la place sur mon siège, je reste zen et je lui souris, ce qui va la déstabiliser, plutôt que d'être moi-même mal à l'aise. Idem en discothèque, si j'entends un quelconque commentaire sur mon poids, je ne complexe plus du tout et je danse de plus belle. Voilà une façon épanouissante de voir la vie, qui a une répercussion positive sur mon travail et sur ma vie personnelle »..