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Smaïn : “Le rire est un don du ciel extraordinaire”

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Dès le 3 avril prochain, Smaïn « fête ses 20 ans de carrière » au Théâtre du Gymnase à Paris*. A l’occasion de ce spectacle-anniversaire, il donnera 20 représentations exceptionnelles retraçant les plus grands succès de sa carrière remis au goût du jour. Au programme ? Un mélange de tendresse et de dérision. Rencontre avec cet humoriste-comédien-producteur-scénariste résolument plein d’énergie et de sensibilité.

Savoir Maigrir : Né le 3 janvier 1958 à Constantine en Algérie, vous arrivez en France en 1960 et vous êtes recueilli par une famille d’origine maghrébine. Vous grandissez entre Vincennes et Saint-Mandé, entre flipper et programmes télé. D’où vient votre sens de l’humour et de la dérision déjà bien présent malgré une enfance et une adolescence qui ne vous sourient pas toujours ?
Smaïn : C’est presque inexplicable. Dans le domaine de la psychanalyse, on parle toujours de la résilience. Autrement dit de la capacité à s’en sortir malgré les épreuves de la vie. Pour ma part, j’ai réussi à trouver ma force dans ce qui me restait : le rire et l’autodérision. D’où l’expression : « mieux vaut en rire qu’en pleurer ». Je pense que j’ai été porté par cet instinct de survie. J’ai ainsi voulu donner un sens à ma vie plus amusant que la réalité. Pour cela, j’ai puisé autour de moi. J’ai commencé par imiter ce que je voyais à la télévision qui a été un élément prépondérant pour moi. Et j’ai beaucoup observé les comiques. C’est comme cela que j’ai fait mon choix de vie.
 
S.M. : Vous adorez Jerry Lewis, Laurel et Hardy et votre comique préféré reste Buster Keaton…
S. : La révélation a vraiment été Jerry Lewis. Mais de Laurel et Hardy, en passant par Fernandel, Bourvil et tous ceux que j’ai pu voir à la télévision, tous m’ont beaucoup appris. Quant à Buster Keaton, je trouve qu’il possède une poésie qu’on ne retrouve chez aucun autre. J’aimais bien le regard triste de cet homme tout en contradiction qui, en même temps, me faisait rire. Il était amusant malgré lui.
 
S.M. : Vous considérez Léo Ferré comme un second père spirituel. Pourquoi ?
S. : Parce que quand j’ai perdu le mien, j’avais 13 ans. J’étais retourné dans un foyer de la Ddass (Direction départementale des affaires sanitaires et sociales,ndlr). Et un jour, je suis parti en vacances à Barcelone et une amie espagnole m’a fait écouter Léo Ferré. J’ai d’abord adoré ses musiques et leur belle mélodie, puis ses textes. J’ai écouté ses premières chansons : « L’île Saint Louis », « A Saint-Germain-des-Prés », « La chanson du scaphandrier », « la Vie d’artiste »... Toutes m’ont ému. J’ai compris que la musique pouvait porter un texte. Et réciproquement. De plus, Léo Ferré était très paternaliste et colérique. Voilà pourquoi il se substituait au père que j’avais perdu.
 
S.M. : Que retenez-vous de vos débuts au petit cabaret parisien « Le Caveau de la Bolée » ?
S. : C’était lelaboratoire, ma première école, le début. Parce qu’il y a un début à tout. Le plus dur, ce n’est pas de réussir, mais de durer. Je me considère vraiment comme un autodidacte. Je suis et je reste un comique indépendant.
 
S.M. : En 1983, Philippe Bouvard vous remarque, impressionné par votre talent et votre écriture. Il vous offre une place de choix dans son célèbre « Petit théâtre ». Que dire de cette période ?
S. : C’est l’époque où letalent est porté à la télévision. Le fait de savoir que ce que je faisais au petit cabaret parisien se multipliait à l’image a été pour moi un démarrage fulgurant, magnifique. C’était énorme !
 
S.M. : Avec Didier Bourdon, Bernard Campan, Pascal Légitimus et Seymour Brussel, vous formez alors « Les Cinq » durant presque une année. Racontez-nous…
S. : Nous avons eu beaucoup de fous rires ensemble. C’était plaisant pour moi parce que j’étais sur scène avec mes camarades. Mais je ressentais parfois des frustrations, parce que j’avais l’impression de servir une équipe et de ne pas avoir ma propre identité. Il fallait que je puisse l’affirmer. À l’époque, quitter la troupe et partir vers d’autres horizons représentait un grand danger. Malgré tout, j’ai fait mon choix. Ensuite, je me suis laissé guider par l’acharnement et la chance. Et voilà !